(Derrière) la photo de Pourim

Ils sont là, sur la photo, déguisés, souriants et merveilleux. Eux, les enfants, nos enfants, dont on envoie le cliché fièrement, dans un consensus général, sur les réseaux sociaux ou par whatsapp, où on s’extasie mutuellement sur leur croissance et la mignonnerie de leurs costumes. Une fois par an, parfois deux avec la rentrée scolaire, on peut s’enorgueillir en  toute légitimité de notre progéniture. On fête Pourim dans les écoles. Les photos sont colorées et ensoleillées.

C’est parce qu’on ne t’y voit pas, toi, le parent échevelé et en retard qui crie depuis plusieurs minutes à ses enfants surexcités : Attendez, il faut faire la photo !! Venez faire la photo !! Ohh les enfants!!

Toi qui viens de passer une matinée éprouvante pour réussir sans trop de dommages à faire enfiler les costumes à ta petite troupe et sortir à temps. Toi qui tentes de préserver la joie du moment, la sueur au front, en gérant les frustrations de dernière minute.

Toi qui viens de passer une semaine à déchiffrer et à répondre aux multiples sollicitations de leurs écoles et ganim qui rivalisent de créativité en cette période de Pourim. La répartition des tâches est claire : L’école donne les directives (lumineuses) et toi tu exécutes. Parfois sans préavis. Pendant plusieurs jours. Les petits sont ravis et toi lessivée.

Sur la photo, dans leurs petites mains  les michlohey manot (paniers de friandises traditionnels de Pourim) sont bien présentés et emballés pour les copains d’école. Tu t’es couchée très tard hier pour les préparer.

Dans ta maison, ça déborde de partout. Et sur la table de la cuisine, des montagnes de sucreries et de chocolats reçus pour la fête, ventres barbouillés et petites mains collantes en perspective.

Mais en arrière plan de la photo,tu peux aussi palper le bonheur de fêter Pourim ici, en Israël, comme la chose la plus naturelle du monde. Tu t’ennivres de la folie créative ambiante. Tu reçois des petites attentions des uns et des autres. Accompagnées de brah’ot, ces petites lettres personnalisées,  grande spécialité israélienne, qui réchauffent encore une fois le cœur. Tu écoutes la Meguila et tu ressens de la joie, beaucoup de joie, malgré la fatigue.

Et puis ce soir, quand les petits iront dormir, ce sera enfin au tour des grands de prendre la relève pour fêter ça dignement. Pour se déguiser et perdre la tête le temps d’une soirée. Bien méritée.

Voilà à quoi ressemble le Pourim des parents en Israël. Des journées intensives et épuisantes, mais pleines d’une joie simple qu’on accueille volontiers.

Hag Sameah!

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Il pleut sur Israël

Tu entends à la radio un arabe qui soutient que tout est de la faute de l’occupation. Il veut dire l’occupation de l’ensemble d’Israël, bien sûr. Que non, un juif ne peut en aucun cas prier sur le Dôme du Rocher, parce que ce lieu est musulman, comme le reste. Le présentateur le remet à sa place gentiment. Tu mesures le danger et tu frémis. La démocratie semble bien faible face à son idéologie. Et notre unité aussi.

Pendant ce temps, il pleut sur Israël.

L’inquiétude monte en Europe et ailleurs, une fois de plus. Comme un cycle immuable. La haine se déploie, s’étend, les tombes sont profanées, les arbres arrachés, les représentants violentés. La parole se libère, on passe aux actes. Puis tout se calme. Quelques discours bienveillants. Voilà, ce n’est rien, juste le fait de quelques-uns. Il reste plein de gens bien.

Les débats se relancent. Antisémitisme. Antisionisme. Pourquoi? Alyah ou pas. Jusqu’à la prochaine fois.

Ici, la pluie continue de tomber.

Et rien n’est calme, comme d’habitude.

L’électricité est dans l’air, au-dessus des flaques. Les élections approchent. Tu suis les alliances et les campagnes. Tu écoutes la douleur d’une mère qui refuse que l’on se serve de la tombe de son fils tombé à Tsouk Eytan pour faire de la politique. Tu la comprends si bien.

Tu entends les mots Am Israel sur toutes les lèvres et tu t’interroges sur le destin de ton peuple. Sur ta place en son sein. Sur le rôle de chacun.

Il pleut toujours.

Les enfants ont ressorti le carton des déguisements. Bientôt Pourim, les réjouissances et l’insouciance.

Tu demandes à la libraire où est le livre qui parle des fêtes et des bénédictions? C’est du domaine de la religion, on n’en a pas ici, il faudra commander.

Il pleut. La Nature explose de beauté, tout fleurit tellement fort, en cette fin d’hiver. Le lac de Tibériade est presque plein. Ca ruisselle de partout. Alors tu te concentres sur ça, en attendant, parce que c’est simple et magnifique, et que ça remplit ton cœur de joie.

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Le puzzle

Tu rêvais d’en faire partie

Tu as demandé, et on t’a accueilli

Sans formalités

Voilà ton ticket

Maintenant à toi de jouer.

—–

Tu es ta propre pièce à modeler,

Apprends, comprends, évolue et pars chercher

Où est ta place précise, où portera ta voix

Explore tout autour, mais surtout en toi

—–

Où est le modèle de l’image à compléter?

Ça c’est un secret.

Tu n’en verras qu’une ombre furtive, qui t’émouvra aux larmes

Dans les moments collectifs de joie, ou de grand désespoir.

—–

Tu pars à la recherche des pièces formées comme toi

Tu fouilles sans répit, mais il n’y en a pas

Chacune est unique, dans ses couleurs et dans ses pensées

Tu te rapproches de celles qui te conviennent pour t’y souder

—–

Voilà, tu as trouvé ta place et  tu observes tout autour,

Des blocs sont formés, ça semble fonctionner mais ça n’est pas complet.

Où est le modèle de l’image rassemblée?

On t’a dit que c’était un secret

—–

Tu entends les voix agacées de ceux qui veulent avancer

Ces pièces rouges sang, là-bas, à l’extrémité, 

Ne peut-on pas les sortir du jeu? Elles dérangent et elles harcèlent

Non, rien ne serait possible sans elles.

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Et celles là, tout en haut, qui lèvent les yeux au Ciel,

Qui vivent une autre vie, un autre temps, dans l’irréel,

Comment les intégrer, c’est incompréhensible

Sans elles non plus, évidemment, rien ne serait possible.

—–

Tu observes en silence, tu ne comprends pas tout,

Les voix trop fortes te font douter par leur courroux

Cette pièce est en trop, elle est si différente

Et ce bloc là, qu’il se taise ou qu’il parte, il nous hante!

—–

Mais ton privilège de nouveau c’est ton espoir encore pur,

Celui qui te permet d’entendre, au-delà des éclats, un doux murmure

Qui te souffle ce que les cœurs savent mais ont parfois oublié

Que chaque pièce a toute sa place dans ce puzzle bien aimé,

Et que pour en voir un jour toute la beauté, le secret sera simplement de l’accepter.

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